Radome et Clinamen V2

Ce jour‑là, je ne travaillais pas et c’était un de mes premiers jours de repos depuis plusieurs mois. Peu habituée à ne pas devoir me lever, je me réveillais aux aurores. Je regardais par la fenêtre, nous étions en novembre et par conséquent il avait l’air de faire froid. Pour ces deux raisons, je décidais de rester chez moi me reposer. Mais finalement je ne me voyais pas rester dedans toute la journée et je décidais d’aller me promener. Après tout ça faisait longtemps que je ne m’étais pas me promener et cela me manquait. Le fait de marcher me donnait une forme de nécessité que je n’avais pas ressenti depuis longtemps. Mes pas me dirigèrent sans m’en rendre compte en direction de la place Antonin Poncet, qui n’était pas loin de chez moi. Il était dix heures et alors que d’habitude il y avait moins de monde, aujourd’hui, au contraire les gens se dirigeaient sur la place. Intriguée, je décidais de les suivre et je compris rapidement la raison de tout ce monde. Alors que j’arrivais sur la place, je vis une demi-sphère blanche au milieu de celle-ci. C’est vers cet endroit que les gens autour de moi se dirigeaient.

Ma première réaction fut de me demander ce que cette sphère faisait là en plein milieu de la place. Sa présence me parut si incongrue en ce lieu, elle se démarquait tellement des autres bâtiments et, en même temps, on aurait dit qu’elle avait toujours été là, à sa place. Je crus d’abord qu’il s’agissait d’un vaisseau extraterrestre qui aurait atterri pendant la nuit sans laisser de traces ni faire de bruit dans le but d’envahir la Terre.

Passé cette première impression, ce n’était pas dans mes habitudes de visiter des œuvres surtout de l’art contemporain. Mais finalement, je décidais pour une fois de changer mes habitudes et décidait donc de rentrer dans le dôme. Lorsque j’entrais, je me retrouvais dans un lieu sombre par rapport à dehors et la seule lumière qui entrait provenait des portes. J’eus l’impression d’avoir passé une porte vers un autre monde, une autre dimension et que quand je ressortirais, je ne me trouverais pas au même endroit où j’étais avant d’entrer dans cette bulle. J’avais la sensation de me trouver dans un monde à part, une parenthèse dans l’espace-temps comme si ici le temps ne s’écoulait pas de la même manière, comme s’il se trouvait ralenti. On aurait dit aussi comme un sas car les deux portes permettant d’entrer dans le dôme se trouvait face à face, on avait donc l’impression que ce lieu était comme un passage entre deux mondes, un lieu qui serait la porte vers d’autres mondes. L’impression en était renforcée par le fait que quand on regardait les deux portes, on ne voyait l’extérieur, juste la lumière qui entrait.

Il y avait beaucoup de monde et la plupart discutaient entre eux sans vraiment porter attention à l’œuvre mais il y avait quelque chose de différent par rapport à dehors, les sons me paraissaient assourdis et on entendait des clapotis d’eau. Au centre du dôme, il y avait en effet un bassin rempli d’eau et contenant des bols qui, portés par le mouvement de l’eau, s’entrechoquaient. Cela me faisait penser à des bols tibétains et cette ouvre apportait un sentiment de calme, de tranquillité et incitait à la méditation. C’était peut-être même le but qu’avait cherché l’artiste de cette œuvre.

Pouvoir entrer sous ce dôme et tourner autour du bassin changeait mon rapport à ces œuvres. Je me sentais impliquée, concernée, de pouvoir pénétrer dans l’univers créé par les artistes, un peu comme si j’avais l’occasion d’entrer dans un tableau et de le visiter.

Peut-être est-ce dû au fait que ces deux œuvres étaient simples, minimalistes et avec des couleurs froides comme le marron, le bleu ou le blanc, mais en tout cas mon imagination se trouvait renforcée par cette quasi-absence de détails, cette absence de couleurs. Dans cet endroit minimaliste, épuré, je ressentais un sentiment de calme, de tranquillité et j’avais l’impression de me trouver dans un endroit. Je ressentais le même effet que si je me serais trouvé dans une église ou encore dans un endroit religieux comme un monastère ou encore un temple.

La forme de ce dôme me donnait l’impression de me trouver dans un planétarium, je pouvais m’imaginer voir les étoiles, les galaxies, bref tout l’univers, ce qui augmentait encore chez moi le sentiment d’être dans un nouveau monde. Cette œuvre me faisait penser aussi à un œuf du faut de sa couleur et de sa forme mais aussi à une yourte par sa forme et aussi sa texture car l’artiste de cette œuvre nommée Radome, avait créé de nombreuses habitations dans le même matériau, la fibre de verre.

J’avais aussi le sentiment d’être entré dans une ruche, on aurait dit que les parois du dôme étaient composées d’alvéoles et les personnes qui entraient par de groupes de deux ou trois dans cette « ruche », discutant entre eux me faisaient à des abeilles par leurs mouvements d’entrée et de sortie incessants.

Ces deux œuvres donnaient des impressions différentes mais en même temps, elles semblaient avoir été faites pour se rencontrer, elles se complétaient l’une l’autre, fonctionnaient ensemble. En effet, ces deux œuvres jouaient sur les formes : le dôme avait une forme de demi-cercle qui contenait un cercle remplit de cercles. Le fait que beaucoup de cercles soient représentés me faisait penser que le cercle n’avait ni début ni fin, qu’un cercle était infini alors que justement ces deux œuvres ne seraient pas là éternellement, qu’elles étaient éphémères et cela me faisait penser à la vie et à la mort et que tout chose avait une fin.

Je suis restée plusieurs heures en train de contempler les bols et de les écouter chanter. Jamais ça ne m’était arriver d’avoir un attrait comme cela pour une œuvre, encore plus pour de l’art contemporain.

En ressortant, je pensais alors que l’association de ses œuvres n’avait pas été la seule chose pensée, c’était aussi le cas de la localisation. En effet, le fait d’avoir installé ces deux œuvres sur cette place n’était pas un hasard. L’œuvre était mise en avant, c’était même la première chose qu’on voyait lorsqu’on arrivait sur la place, du fait de sa grandeur. Elle se démarquait par sa modernité des bâtiments aux alentours qui étaient tous anciens mais aussi par sa forme de demi-cercle, par rapport aux bâtiments alentour, tous de forme rectangulaire. Cela me faisait un peu penser à la pyramide du Louvre et à la tour Eiffel qui toutes les deux se distinguent des bâtiments qui les entourent.

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