Le roi Ours et les Castors

« Avis à la population : Une révolte a eu lieu, menée par des Castors. Ceux-ci se sont regroupés en entre eux et ont attaqué tous les membres de la garde. Ils n’ont pas hésité à en tuer un grand nombre. Toutes les interventions pour lutter contre eux se sont révélées être des échecs. Ils sont bien organisés et en surnombre par rapport à la garde. Ils ont même réussi à convaincre certains opposants de la justesse de leur cause et certains gardes ont désertés. »

En réaction, Ours, notre roi, décida d’organiser une réunion pour prendre des dispositions au sujet de cette révolte. Il parla ainsi : « Mes chers concitoyens, l’heure est grave. Comme vous le savez déjà, les Castors se sont révoltés et ont pris possession de la ville. Nous devons tous faire pour la récupérer et punir les responsables de cette révolte. Certains d’entre vous pourraient penser que leur cause est juste mais il n’en est rien. Leur seul but est de remettre en cause notre pouvoir par n’importe quel moyen. Toutefois, nous ne mettons pas au même niveau qu’eux en les tuant comme ils ont tué nos hommes. »

Serpent, son conseiller, s’avança et susurra : « Vous avez raison comme toujours, ô mon roi. Nous ne pouvons pas nous permettre de nous laisser envahir par cette plèbe. Nous devons réagir rapidement et reprendre la situation en main. Sinon ces individus pourraient croire qu’ils auraient réussi à nous vaincre. Il est nécessaire que ces agitateurs soient réprimés pour le bien de notre communauté. Même si je comprends votre volonté de ne point s’abaisser à leur niveau, nous sommes contraints de répliquer par la force. Seule une réplique musclée leur fera comprendre à ces barbares. »

Persuadés de l’honnêteté et de la bonté de leur roi et de la traîtrise des Castors, tous les autres animaux, à ce discours, acclamèrent le roi et lui déclarèrent leur soutien dans cette affaire. Ils en voulaient beaucoup aux Castors d’avoir voulu remettre en cause le pouvoir de leur roi adoré. Ils voulaient à tout prix et à grands cris retrouver la paix, leurs habitudes, sans réfléchir même aux conséquences.

Soudain, au milieu des discussions, une voix retentit plus forte que toutes les autres : « Taisez-vous ! » Tous les animaux se retournèrent comme un seul homme vers la personne qui avait osé intervenir. Contrairement à avant, où un désordre sans nom régnait, on aurait pu entendre un mouche voler. Un silence de mort. Personne ne parlait, attendant qu’elle explique pourquoi elle s’était permis d’interrompre cette assemblée.

Il s’agissait d’un Cochon qui parla ainsi : « Je ne suis pas de votre avis. » Un mouvement de protestation se répandit dans l’assemblée. « Laissez-moi finir. Je pense comme vous tous que leur façon de faire entendre leur voix n’est pas louable mais leurs motivations sont bien plus compréhensibles que vous ne croyez. Ils cherchent à gagner leur vie et non à remettre en cause le pouvoir actuel. Je sais que vous condamnez leurs actions mais je vous prie d’écouter leurs revendications. Vous pourrez régler cette révolte sans que plus de sang ne coule. N’est-ce pas ce que vous souhaitez ? » Et, se tournant vers le roi et son ministre, il ajouta : « Si vous voulez conserver votre pouvoir, il peut être intéressant de faire certaines concessions. Et puis votre but n’est-il pas de faire en sorte que tout votre peuple puisse vivre et travailler décemment et en paix ? »

Il s’ensuivit alors un nouveau mouvement de protestation chez les autres animaux. « Nous ne pouvons pas répondre à toutes leurs attentes. Sinon ils croiront avoir une influence sur nos décisions et revendiqueront encore et encore. Nous ne pouvons donc pas nous risquer à accepter leurs demandes » disaient certains. Cette intervention avait ranimé le débat. Alors que tous croyaient être d’accord quant à ce qui leur restaient à faire, voilà que certaines de leurs convictions se trouvaient un peu ébranlées. Le roi Ours, même s’il n’en montra rien, n’avait pas vraiment apprécié qu’on ose le critiquer. Blessé dans son amour-propre, il décida de ne rien changer à ses projets. Après tout, la majeure partie de l’assemblée semblait de son avis. Le roi envoya une partie de l’armée dans le but de réprimer les Castors. Nombre d’entre eux furent arrêtés et exécutés pour avoir voulu renverser le roi ou pour avoir assassiné lâchement de nombreux gardes. Quant au Cochon, il perdit sa place privilégiée car il était désormais considéré comme traître au royaume. On n’entendit plus jamais parler de lui.

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